Par : Kemo Kanyi
L’économiste des ressources et spécialiste de la finance durable, Dr. Foday Joof, a mis en lumière les faiblesses et inefficacités du mécanisme de transmission de la politique monétaire en Gambie.
Dans une récente interview avec ce journaliste, il a expliqué pourquoi la politique monétaire du pays pourrait être faible, peu fiable, voire inexistante, en pointant du doigt des lacunes structurelles plutôt que des facteurs financiers comme principale cause de l’inflation.
Dr. Joof a souligné que dans les économies avancées, la politique monétaire influence la demande globale par quatre canaux principaux : le canal des taux d’intérêt, le canal des actifs, le canal du crédit et le canal du taux de change.
Cependant, il a soutenu que la transmission de la politique monétaire en Gambie diffère considérablement en raison de la structure du système financier du pays. Il a attribué cela à l’absence de marchés performants pour les titres à revenu fixe, les actions et l’immobilier, ainsi qu’à une intégration limitée avec les marchés internationaux de capitaux privés.
De plus, l’intervention importante de la Banque centrale sur le marché des changes affaiblit davantage l’efficacité de la politique monétaire.
« Cela laisse à la Gambie un seul canal probable pour la transmission de la politique monétaire — le canal du prêt bancaire — puisque les autres canaux sont probablement faibles et peu fiables en raison de la domination des banques, qui contrôlent environ 90 % des actifs du secteur financier », a expliqué Dr. Joof.
Il a également souligné que même ce canal du prêt bancaire est affaibli par plusieurs facteurs, notamment le manque de compétitivité du secteur bancaire, la petite taille du marché financier et le fait qu’une grande partie de l’économie fonctionne en dehors du système bancaire. De plus, il a noté que le coût élevé des prêts est aggravé par un environnement institutionnel fragile.
Interrogé sur les solutions possibles pour faire face à ces défis économiques, Dr. Joof a recommandé de prioriser le renforcement du système financier afin d’améliorer l’efficacité de la politique monétaire.
« La Banque centrale de Gambie (CBG) devrait se concentrer sur le développement des marchés et des institutions financiers en améliorant leur profondeur (taille et liquidité), leur accessibilité (capacité des individus et des entreprises à utiliser les services financiers) et leur efficacité », a-t-il déclaré.
Par ailleurs, il a conseillé à la CBG de limiter l’activisme monétaire et d’éviter d’adopter un cadre basé sur des annonces publiques d’objectifs, comme un régime de ciblage de l’inflation.
Enfin, il a suggéré que les taux de la politique monétaire soient utilisés comme outils de signalisation plutôt que comme mécanismes directs de lutte contre l’inflation. Son analyse met en évidence l’urgence de réformes dans le secteur financier gambien pour assurer un mécanisme de transmission monétaire plus efficace et fiable.