Des migrants gambiens dénoncent des abus et un abandon dans le désert par les autorités tunisiennes

Par : Fatou Krubally

Des migrants gambiens tentant de rejoindre l’Europe par la Méditerranée ont signalé de graves mauvais traitements infligés par les autorités tunisiennes, notamment des interceptions en mer, des violences physiques et des abandons dans des zones désertiques proches de la frontière algérienne.

Selon des témoignages directs publiés sur la page de suivi de la situation migratoire d’Ebrima Drammeh, un groupe de 48 migrants, majoritairement originaires de la Gambie et de la Guinée, est parti de KM 19 à Sfax, en Tunisie, dans l’espoir de rejoindre les côtes européennes. Leur trajet a été brutalement interrompu lorsque la Garde nationale tunisienne a intercepté leur embarcation, confisqué le moteur et le carburant, et les a laissés bloqués en mer toute la nuit, exposés au froid glacial.

Un migrant gambien a raconté leur calvaire :

« Salut frère, nous sommes sur le grand bateau. Nous avons passé la nuit en mer. Les gardes nationaux tunisiens ont pris notre moteur et notre carburant mais nous ont quand même laissés sur l’eau. Il fait très froid ici. Je peux encore communiquer, mais une fois au port, ils vont nous prendre nos téléphones. Je pense que je vais dire au revoir pour le moment. Nous sommes très inquiets car nous ne savons pas où ils vont nous emmener aujourd’hui. »

Le lendemain matin, les migrants auraient été transportés depuis le port lors d’un trajet exténuant de neuf heures vers le désert. Durant ce transfert, ils affirment avoir été ligotés aux mains et aux pieds, et frappés violemment, certains ayant subi des blessures, notamment à la tête.

Parmi le groupe se trouvaient des personnes vulnérables, dont une femme enceinte et une mère avec son enfant. Arrivés dans le désert, près de la frontière algérienne, les migrants ont été abandonnés sans aucune ressource. Certains ont réussi à traverser la frontière pour se cacher en Algérie, tandis que d’autres sont toujours bloqués dans le désert. Un migrant gambien a témoigné :

« Ils nous ont sortis de l’eau (la mer) et nous ont amenés ici. Ils nous ont pris au port, et nous avons mis 9 heures pour arriver dans le désert. Ils nous ont tous attaché les mains et battu sur tout le corps. Certains sont blessés ; certains ont la tête touchée. Ils ont attaché les mains et les pieds de beaucoup d’entre nous, puis nous ont entassés dans un bus surchargé parce qu’ils avaient intercepté plusieurs bateaux. »

Cet incident n’est pas isolé. Des rapports indiquent que les autorités tunisiennes ont procédé à des expulsions similaires de migrants vers des zones désertiques à la frontière avec l’Algérie et la Libye. Ces pratiques soulèvent de vives inquiétudes parmi les organisations de défense des droits humains. Les expulsions collectives, l’absence de procédure régulière et l’exposition des migrants à des conditions extrêmes sans accès aux besoins de base sont perçues comme des violations du droit humanitaire international.

La coopération continue entre l’Union européenne et la Tunisie en matière de contrôle migratoire est également remise en question, avec des appels à veiller à ce que ces partenariats ne contribuent pas à des abus des droits humains.

La situation actuelle et le sort des migrants gambiens concernés restent incertains. Des groupes de défense appellent les autorités tunisiennes à mettre fin à ces expulsions et à respecter les normes juridiques internationales dans le traitement des migrants et des demandeurs d’asile.

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